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10.24.2012

Cinglante jeunesse!

Ma critique du spectacle de Guillaume Wagner, telle que publiée sur le site www.ruerezzonico.com
Ben oui, celui qui fait tant jaser. Ne soyez pas intimidés, lisez! Lisez!

Cinglante jeunesse!


Faut croire que Mohammad Ali avait raison… à propos de Guillaume Wagner. Pour être bon, il faut croire qu’on l’est. Et ce n’est pas de la prétention quand on livre la marchandise annoncée.
Par Pascale Lévesque
Cinglant, le premier spectacle solo de l’humoriste, n’a peut-être pas mis k.o. tout ce qui bougeait, mais il a remporté la majorité des rounds sur le ring du Théâtre St-Denis lors de sa rentrée montréalaise.
Il faut un certain « mojo » pour présenter un premier one man show. Il faut être un peu fou pour renchérir sur l’attente du public et des médias en vendant ses billets un an d’avance dans un beat the clock, en multipliant les entrevues et en s’exposant pratiquement à chaque mois sur le sujet, tant à la télé, à la radio que dans les journaux.
Réflexion faite après avoir reçu le dossier de presse du jeune Wagner épais de près d’un centimètre à l’entrée du théâtre : « Guillaume, t’es mieux de livrer… »
Chose promise, chose due. Sans doute l’un des meilleurs débuts depuis un moment par une recrue, dans ses qualités comme dans ses défauts. D’abord, parce qu’il a fait honneur à son titre, Cinglant.
Sans gants blancs
D’entrée de jeu, l’assistance (enfin, celle qui n’avait peut-être pas compris la signification du titre) a été avertie par le stand-up comic : quand on va voir un spectacle qui s’intitule ainsi, on ne veut pas sur scène quelqu’un qui essaie de nous plaire.
Exit les « matantes », les gens sans jugement, les intellos qui s’émoustillent seulement aux jeux de mots et les vieux « parce qu’ils vont mourir, tsé. Moi j’essaie seulement de me bâtir un public fidèle ».
Avertissement bénéfique et qui, surtout, aura laissé le temps à la foule de digérer l’humour sans gants blancs de Wagner. Car pour se faire écouter, il faut d’abord se faire aimer un tantinet. Soulignant qu’au Québec, on se choque facilement, et peut-être pas pour les bonnes choses il a lancé « On se choque parce qu’André Boisclair prend une graine dans le cul, alors qu’on ne se choque pas quand, à chaque pub de Honda à la télévision, Martin Matte en prend une dans la gueule ».
Ne reculez pas tout de suite sur le dossier de votre chaise, car pour chaque bombe comme celle-là, Guillaume Wagner désamorce.
« Martin Matte a le droit de faire de la pub. Moi, j’ai le droit de ne pas aimer ça », dira-t-il. Et ça va pas mal ainsi pour tous ses punch incendiaires : on allume, mais l’extincteur n’est jamais loin, de sorte que l’on comprend bien que c’est de l’humour avant tout.
La manière américaine
Tant mieux, parce qu’il va s’en dire qu’en empruntant le style stand-up à l’américaine, des punchs, il y en a. Si certains étaient surpris de voir Wagner discourir des relations hommes femmes compte tenu de son engagement social particulièrement étalé dans les médias, sachez qu’il n’a fait que suivre les préceptes du genre d’humour qu’il exploite
Un stand-up sans jokes de couple, c’est comme un sundae sans cerise. À ce titre, on doit lui lever notre chapeau parce que sans réinventer le sujet, il a su y insuffler fraicheur et originalité, même en reprenant ses personnages déjà connus du « dude tcheck mes gros pipes » et de la pétasse « r’gard mes gros totons ». Disons qu’avec Occupation double qui sévit encore pour une raison qu’on ignore, l’image est d’actualité et encore très, très efficace.
Son monologue principal sur le thème était équilibré et réaliste quant aux stéréotypes féminins et masculins. Sans doute le genre de numéro que Patrick Huard aurait rêvé de faire dans Le Bonheur présenté plus tôt cette année.
Surtout le point culminant de cette longue tirade, où Wagner analyse le sens du mot misogyne. « L’homme est tellement content d’être un homme qu’il pense qu’un pénis, ça règle tout! Aussi stupide que ça », avance l’humoriste, avant d’y aller avec toutes sortes d’exemples et même d’avancer que la misogynie pouvait aussi être féminine. Une réflexion brillante, juste, et qui sans faire la morale, laisse quand même songeur. Peut-être le numéro le plus complet et travaillé de Cinglant.
Grosse équipe
D’ailleurs, il convient de souligner à quel point l’artiste a été bien entouré dans la construction de son spectacle. Son script-éditeur Jean-François Mercier a judicieusement su le conseiller sur la chronologie des gags dont l’ordre et l’enchainement étaient très pertinents.
Son metteur en scène, Daniel Fortin, a quant à lui été capable de mettre en valeur les qualités d’interprétation de l’humoriste qui entrait efficacement dans ses personnages et qui en sortait juste à temps, avant de devenir cabotin. Malgré tout, il aurait peut-être fallu contenir l’ardeur du poulain.
Avec ses sujets plus sociaux, la deuxième partie s’annonçait encore meilleure que la première. Conflit étudiant, perte des idéaux québécois, politique, religion… Or, on s’est rapidement aperçu que Wagner en avait donné un peu plus que prévu avant l’entracte et qu’il a dû composer avec ses réserves jusqu’à la tombée du rideau. Sa tendance à répéter deux à trois fois la même phrase avant d’enchaîner avec son punch est l’un des quelques indices qui trahissaient sa fatigue. C’est parfois ce qui arrive quand on est jeune et qu’on défonce tout dès le départ.
Devenir un humoriste mature, perdurer et se renouveler perpétuellement? On peut dire que c’est ce que cette première nous annonce sur cette recrue-qui-n’en-est-plus-une.
Guillaume Wagner est sur la bonne voie de devenir un homme tout en restant jeune. En autant qu’il prenne les moyens pour y arriver et qu’il se souvienne, comme le disait Ali, « It’s not bragging if you can back it up ». 
Cinglant de Guillaume Wagner, mise en scène de Daniel Fortin, script de Jean-François Mercier. En tournée pour 2012 et 2013.

10.16.2012

Kavanagh

Je participe au blogue de mon ami Philippe Rezzonico. Journaliste culturel émérite qui a décidé de rester dans la rue même si le lock-out qui nous affectait était terminé.
Quelle rue déjà? www.RueRezzonico.com

Voici le mon compte-rendu / critique du spectacle d'Anthony Kavanagh publié sur ce site web il y a quelques semaines.

Anthony Kavanagh joue à domicile: entre l’ovation et le banc des punitions
Anthony Kavanagh en avait des choses à dire, jeudi, lors de la première montréalaise de son spectacle Anthony Kavanagh joue à domicile. Des choses amusantes, des bonnes et parfois des moins bonnes… Pas de quoi faire honte toutefois à Gregory Charles, Corneille ou Luck Mervil avec qui le public aurait pu un jour le confondre, comme il se plait à lancer à la blague. N’empêche, si ce One man show semble plus de son temps que l’était le précédent, il souffre quand même d’un certain décalage.
Par Pascale Lévesque
Pour Joue à domicile, Kavanagh a mis les efforts pour de ne pas répéter l’erreur deAnthonyKavanagh.com, présenté en 2008, alors qu’il avait adapté son matériel français pour le Québec. Le résultat est supérieur et, dans l’ensemble, une fois le rideau tombé après les quatre chansons faites en rappel par l’humoriste, on a le sentiment d’avoir passé une très agréable soirée.
D’emblée, l’humoriste est heureux d’être là, sur scène, à partager avec son public de Montréal. Sentiment qui émane d’autant plus lorsqu’il se met à improviser et à faire toutes sortes de digressions pour alimenter la foule qui en redemande. C’est particulièrement vrai dans ce numéro où il filme la salle avec son téléphone cellulaire, prétexte à conserver un souvenir vidéo de cette première.
C’est sans doute cette attitude qui lui sied le mieux, tout comme le découpage du spectacle, clairement structuré en une dizaine de numéros. Mais lorsqu’on s’attarde à ceux-ci, aux textes et sa livraison, ce qu’on a vu jeudi est loin d’être une œuvre achevée.
Soit Kavanagh tente quelque chose d’original et perd sa fluidité habituelle lorsqu’il livre son texte, comme en font foi cette excellente introduction où il se met constamment les pieds dans les plats en insultant maladroitement tout ce qui bouge sur terre, ou encore cette tentative très drôle d’expliquer la gauche, la droite et le centre… Soit il nous en met plein la vue en misant sur des clichés et du déjà-vu. Que doit-on privilégier? L’efficacité au détriment de la profondeur? Ou un discours politisé et des exercices de style au détriment de la livraison?
Les cibles féminines
Chose certaine, il est regrettable d’avoir choisi de parsemer ce spectacle de gags faciles, voire même complaisants avec le public, taquinant des cibles qui sont récurrentes en humour et qui font rire à coup sûr. Rien de mal si l’objectif est atteint, mais pourquoi s’en contenter?  Ce décalage est particulièrement agaçant lorsque Kavanagh prend les femmes comme cible, multipliant les références usées, superficielles et à la limite sexistes.
La femme qui peine à suivre un GPS, Michèle Richard qui se laisser aller sur un tapis, une allusion au physique imposant de Marie-France Bazzo et autres comparaisons peu flatteuses aux endroits de Pauline Marois et Françoise David ne sont que quelques exemples de ces blagues agaçantes.
Blagues faites sans aucun doute sans malice par l’humoriste, mais c’est justement ce qui dérange le plus. Le fait que ce soit si naturel de traiter les femmes de « nounounes » ou de folles, qu’on ne désamorce jamais, qu’on ne s’attarde pas à rire des réels travers féminins en 2012, mais qu’on se moque plutôt de ce qu’on a toujours présumé (ou imaginé) être ces travers typiquement féminins. En d’autres mots, si tu t’arranges pour rire des filles, ne te contente pas de le faire en running gag, fais-le en profondeur à propos de quelque chose de vrai.
À la lumière de son discours, on pourrait croire que Kavanagh est peut-être trop imprégné de la culture européenne pour être capable de faire une lecture juste de l’évolution dans le comportement des hommes et des femmes du Québec. À l’épicerie, notamment, où, comme le suggère l’humoriste tout un numéro durant, les hommes deviennent semblables à des zombies tellement ils ne savent pas s’y retrouver (sauf dans le frigo à bière, bien sûr, où les femmes sont complètement perdues). Vraiment?  Si c’est la réalité, devons-nous assumer que Ricardo, Louis-François Marcotte, le « Cuisinier rebelle », Stefano Faïta et Daniel Vézina aiment se faire violence?
L’humour gestuel
Dramatique? Non, mais il est normal d’être un peu déçu par les quelques blagues racoleuses qui parsèment cette performance d’une heure et demie sans entracte. Et cela, même si on comprend que ces amorces étaient souvent prétextes à Kavanagh de faire ce qu’il fait de mieux : soit de s’en donner à cœur joie dans l’humour physique et sonore en donnant vie à des personnages de toutes sortes. Le tout, d’ailleurs, judicieusement intégré à ses numéros de stand-up.
Kavanagh offre ici une réelle tentative de renouvellement sauf que le mouvement n’est pas complètement achevé. Il y a beaucoup de bonnes idées qui méritaient d’être développées plus avant, mais qui sont restées en plan ou qui ont été mal bouclées. L’humoriste est au sommet de son art au plan de sa forme, mais son contenu reste à peaufiner.
Cela étant dit, les fans de Kavanagh ne seront pas déçus de le retrouver avec ses mimiques délirantes et son talent pour le bruitage, ne serait-ce que parce qu’il a le don de faire corps avec la foule, d’être généreux et qu’il s’amuse délibérément avec elle.
Anthony Kavanagh joue à domicile, au Théâtre St-Denis II, le vendredi 28 septembre. Supplémentaire, le 22 mars 2013.